LA FAMILLE CRECHE : UNE EXPERIENCE AU SERVICE DE LA SAUVEGARDE ET DE LA PROMOTION DU MOUTON SOLOGNOT
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" Peut-on vivre d'une race locale ? " est une question qui est fréquemment posée à la Fédération ProNaturA France.

Si vous passez par la Sologne ou que vous y êtes en vacances, n'hésitez pas à réaliser une étape touristique et gastronomique à CHEMERY dans le Loir et Cher, au GAEC de la Faubonnière (tél : 02 54 71 81 77). Vous y serez accueillis par la famille CRECHE, qui dispose également d'un point de vente destinés à valoriser les produits de la Ferme.
Vous pourrez ainsi vous en faire une idée plus précise en discutant avec des passionnés de la race ovine Solognote.

Nous avons eu le plaisir de rencontrer Didier Crèche qui nous a accordé un peu de son temps pour nous conter une histoire qui sort franchement des sentiers battus.

Au début des années 1980, il possédait un élevage intensif de mouton vendéens. Mais plus de 500 brebis ne suffisaient même pas à dégager un salaire de Smicard, sans vacances et pour largement plus de deux fois 35 H par semaine. Il connu alors de graves difficultés économiques qui auraient pu le conduire à la faillite.
Une sage réflexion pousse alors la famille CRECHE à essayer de poursuivre et concilier son amour de la gastronomie et celle des races locales.

Un pari risqué est pris : produire des poulets fermiers (dont quelques sujets de race locale : la poule de Contres) et des canards gras (nourris aux céréales produites sur la ferme), ainsi que de la vache Limousine
La Sologne n'est pas le Sud Ouest, mais grâce à des installations adaptées et un bon savoir-faire, le foie gras et les autres produits plaisent. La qualité est là, le bouche à oreille fait le reste.

Mais le succès du GAEC de la Faubonnière s'explique sans doute par le fait qu'il élève, transforme et commercialise essentiellement en vente directe ses animaux.
Sans intermédiaire, la marge bénéficiaire dégagée permet de vivre correctement.

De longue date passionné par les moutons, Didier Crèche ne peut se résoudre à les abandonner. La race la mieux adaptée au climat très humide et au sol argileux de la Région est la race locale : la race Solognote. C'est un mouton qui surprend toujours les néophytes avec son pelage roux.
Il n'en existe pas d'autre comme elle en France. Et il faut aller assez loin en Allemagne pour en trouver une qui a des airs de famille : la rouge de Cobourg dont les ancêtres sont peut-être les moutons Solognots partis pâturer sur les Landes de Brandebourg.

La race ovine Solognote a malheureusement connu le triste déclin de la grande majorité de races locales rustiques. Ses effectifs atteignaient 300.000 tête en 1850.
Du fait de la transformation et la " modernisation de l'agriculture " , elle a failli disparaître dans les années 1960 avec moins de 200 bêtes.
La famille CRECHE retrouve sept moutons chez des personnes âgées et c'est le début d'une grande passion pour cette race unique.

Aujourd'hui, les moutons Solognots représente pour le GAEC un complément de production bien valorisé.
Les 200 brebis dégagent un produit d'environ 46000 €, soit quasiment 15 % du chiffre d'affaires. Cela est tout à fait rentable, en production complémentaire, dans la mesure où cette race est très rustique et demande peu de soins et peu de temps. Du 1er février au 15 avril, les brebis sont sur l'exploitation et agnellent en mars à 95 % sans intervention de l'éleveur. Tout cela en plein air intégral.
Du 15 avril au 1er novembre, les brebis et agneaux partent en transhumance sur différents sites des bords de Loire. On peut d'ailleurs applaudir une initiative du conservatoire du patrimoine naturel de la Région Centre et de l' association pour le pastoralisme dans le Loiret, qui financent l'emploi d'un berger qui conduit un très grand troupeau de moutons Solognots pour entretenir les bords de la Loire.Malheureusement, le financement d'un tel poste est fragile. Alors qu'il conviendrait que les Politiques locaux et Nationaux se penchent sur le problème pour assurer une pérennité aux races locales qui participent à l'entretien des paysages. Enfin, du 1er novembre au 1er février, les brebis sont dans des parcs au bord du Cher.

Les femelles sont vendues en tant que reproductrices, soit à des agriculteurs, soit à l'exportation, soit à des particuliers qui en ont assez de passer la tondeuse et veulent participer à la sauvegarde d'une race menacée. Il est en de même de quelque mâles.

Cependant, la majorité d'entre eux sont engraissés et leur viande est valorisée en vente directe sur l'exploitation. Aujourd'hui, grâce au dynamisme du Flock Book, qui regroupe 34 éleveurs, la race se porte mieux, mais demeure encore à faible effectif. Didier Crèche a poursuivi son engagement en faveur de la race en devenant le président du Flock Book.

2000 brebis sont inscrites au Flock book. Celui-ci a développé la sélection dans le sens d'une résistance des animaux à la tremblante. En outre, un centre d'élevage de jeunes béliers a été créé en 1979 afin de pouvoir réaliser une sélection optimale en évitant au maximum les mauvais effets de la consanguinité, qui menacent trop souvent les races locales.

Afin de faire reconnaître les qualités organoleptiques de la viande de Solognotes, les éleveurs développent une marque " Agneau de race Solognote " qui permet une identification et une promotion de cette production.

Pour faire connaître et promouvoir la race, les éleveurs essaient d'être présents dans de nombreux comices. Si vous vous rendez au Salon de l'Agriculture, vous aurez la chance de pouvoir l'admirer tous les ans.

Enfin, pour tous ceux qui aiment faire un geste pour la biodiversité, il y a au moins eux manières de participer à sa sauvegarde :
- vous pouvez exercer vos talents de gourmets, découvrir et consommer sa viande
- vous pouvez aussi, si vous avez un peu de terrain, élever quelques moutons Solognots.
Alors pour en savoir plus, n'hésitez pas à contacter le Flock Book où à passer par Chemery et déguster les délicieux produits du GAEC de la Faubonnière.

La morale de cette histoire, c'est que finalement, il n'est pas toujours facile de ne vivre que d'une race locale. En revanche, lorsque celle-ci est associée à une production susceptible de produire suffisamment de revenus rémunérateurs et stables, cela devient possible.
Dans ce cas précis, on peut dire que c'est le foie gras qui a sauvé le mouton Solognot.
C'est pourquoi, d'ailleurs, Didier Crèche, comme une immense majorité des agriculteurs français (et même des Français tout court, qui plébiscitent chaque année le foie gras) craint que les Hommes politiques, sous la pression des activistes de la protection animale à buts végétariens, modifient le Code Civil pour donner aux juges saisis par les associations suscitées, la possibilité d'interdire au coup par coup et de façon subjective telle ou telle méthode d'élevage, dont la production de foie gras.

Donc, avant de vous lancer, surtout si vous vous installez pour la première fois à la campagne, réfléchissez longuement aux différentes productions que vous pouvez réalisées, et surtout, à leur complémentarité.

Pour ProNaturA France J-E EGLIN



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