Page  mise à jour le 25 février, 2010
 

Masseube, trou du cul du Monde ?

 

 

 

De la rurauxphobie ordinaire

 

La xénophobie existe. La rurauxphobie aussi.

La scène se passe dans le train Biarritz-Paris.

Une femme, savamment apprêtée et à l’accent précieux, discute avec deux jeunes hommes. L’un deux, d’origine anglo-saxonne, explique qu’il est rugbyman. Passionné par les chevaux, il a trouvé une grande ferme avec des boxes, à acheter, en pleine campagne, à Masseube, au sud du Gers.

A ces mots, la jeune femme s’écrit d’un ton méprisant : « Masseube, mais vous n’y pensez pas ! Vous n’allez pas aller vous enterrer à Masseube ? C’est le trou du cul du Monde ! Biarritz, oui, à la rigueur, mais Masseube, non, suivez mon conseil. De toutes façons, il n’y a qu’à Paris où la vie vaut la peine d’être vécue ! ».

 

En peu de mots, elle venait de traduire parfaitement l’attitude de mépris, de rejet et de dégoût qu’expriment, de plus en plus, certains de nos concitoyens urbains à l’égard de ceux qui habitent à la campagne.

Cette attitude, la rurauxphobie, repose sur les mêmes ressorts psychologiques que la xénophobie et notamment, de très nombreux préjugés :

les ruraux seraient des incultes, des attardés qui n’auraient pas accès à la culture;

ils seraient « peu évolués » (par rapport à quoi ? );

ils ont un fort accent et on ne les comprend pas ou pas bien.

 

Il se met en place, inconsciemment, une échelle des valeurs dans laquelle les centres d’intérêts des ruraux, leurs loisirs ou leurs mode de vie auraient une moindre valeur que celles des urbains.

 

Prenons un exemple : la passion que vouent les ruraux à leurs animaux.
L’ONU a rappelé dans un récent rapport que dans les 20 ans, près de 35% des races régionales anciennes d’animaux de ferme, partie intégrante de notre patrimoine historique et culturel et de la biodiversité, risque de disparaître. Bien que les éleveurs d’agrément, qui sauvegardent bénévolement ces races menacées, soient près de 4 millions en France, ce qui en fait la deuxième force associative derrière les sportifs, on assiste depuis 12 ans à un véritable acharnement réglementaire contre eux.

 

La Société centrale d’aviculture de France, reconnue d’utilité publique, a listé dans un article, toutes les discriminations dont ont été victimes ses membres : examen pour obtenir une « autorisation d’élever », paralysie des transports d’animaux, impossibilité de protéger ses animaux contre la fouine, le putois et la martre protégés par le Ministre vert Yves Cochet, puis par JL Borloo (qui s’est ravisé), dizaines de milliers d’animaux morts pour rien à cause du confinement long de plusieurs mois « par mesure de précaution de la grippe aviaire », projet d’interdiction de vente d’animaux par les particuliers, projets d’interdiction des expositions et concours d’animaux, etc., etc.

 

Or, ces nuées de réglementations en tout genre ne viennent pas de nulle part. Elles sont concoctées par certaines associations de protections des animaux à buts végétariens, qui réalisent un lobbying incessant auprès des fonctionnaires des Ministères de l’agriculture et de l’écologie et qui y font passer de plus en plus ce qu’elles veulent.

 

Discrimination à tous les étages. Comment les ruraux pourraient-ils faire connaître leurs arguments et se défendre alors, par exemple, qu’aucune de leurs associations n’était invitée au Grenelle de l’environnement, ce qui aurait peut-être pu éviter la taxe carbone, dont ils seront les premières victimes. Quant au Varenne des animaux, une seule association d’éleveurs familiaux de loisirs était présente : la Société centrale canine, en face d’une dizaine d’associations de protection des animaux. On a même pu entendre, dans cette instance, la représentante d’une fédération de protection de la nature, en charge du « bien-être animal » déclarer que les urbains connaissaient mieux les animaux que les ruraux, qui étaient, selon elle, des gens « brutaux ». Bonjour les préjugés !

 

Quand un auteur comme Jeangène Vilmer laisse entendre dans un livre « éthique animale » qu’on trouve une forte proportion de ruraux qui sont des zoophiles , au lieu d’une condamnation, de grands journaux lui font une large publicité. ?

 

Dans le terme « phobie », il n’y a pas seulement détestation et dégoût, il y a aussi, étymologiquement, « peur de ». Force est de constater que ce sont bien de grands médias parisiens qui ont créé l’affolement irrationnel autour de la vache folle, la grippe aviaire, la fièvre aphteuse ou la grippe porcine. Combien de morts par rapport au cancer, au sida ou à la grippe normale ?  Un grand journal, qui relaie souvent les articles de protecteurs des animaux à buts végétariens, avait quasiment un article par jour consacré à ce sujet au moment de l’affolement « grippe aviaire ». Les forces de police disent avoir reçu plus de 40.000 appels de personnes qui dénonçaient leurs voisins parce qu’ils n’enfermaient pas leurs volailles. Résultat : un confinement qui a duré par précaution, plusieurs mois et plusieurs dizaines de milliers de volailles qui ne l’ont pas supporté et sont mortes pour rien. Bel exemple de protection animale en effet. Quand ce même journal a déclaré que les chats pouvaient être contagieux des dizaines de personnes ont abandonné leurs chats. Et pas la moindre petite remise en question….

 

Comment s’étonner après cela qu’une partie des Français croient que les agriculteurs sont des empoisonneurs ?

Comment s’étonner que certains perçoivent les chasseurs quasiment comme des criminels de guerre ?

Comment s’étonner que les écoles ne veulent plus recevoir d’animaux ou même, comme avant, visiter des expositions d’oiseaux parce que : « vous comprenez, par précaution, on ne sait jamais… ».

Comment s’étonner que des jeunes, dont les grands-parents étaient pourtant souvent des agriculteurs, ne veulent plus mettre un pied dans une ferme et parlent de « payouses » d’un ton méprisant.

Tout cela…..parce qu’ils répètent ce qu’ils entendent à la télé et lisent dans les journaux.

 

Dans les années 80 et début 90, on entendait encore parler « d’aménagement du territoire », avec cette idée de justice qu’il serait bien d’arrêter de concentrer toutes les activités sur Paris et d’aider des régions qui ont de la place pour accueillir des hommes et des femmes qui ont envie de vivre une vie plus naturelle et moins stressante.

Maintenant, c’est terminé. La gauche comme la droite, sans pensées propres sur l’écologie, disent « amen » à tout ce qui vient de l’écologie fondamentaliste, sans même chercher à construire une écologie humaniste. Il faut « densifier l’habitat urbain » et laisser des territoires vides d’hommes pour que les animaux sauvages puissent vivre librement. Voilà le nouveau diktat idéologique.

 

De nouvelles règles d’urbanisme ont été adoptées et pour celui qui veut construire à la campagne, cela devient un véritable parcours du combattant, qui se termine souvent par un échec.

 

Mesdames et Messieurs les Politiques, montrez donc votre volonté de lutter contre la rurauxphobie.
Commencez par décentraliser en campagne les Ministères de l’agriculture et de  l’écologie et cela ira déjà beaucoup mieux.

 

Aujourd’hui, si des personnalités politiques ou des journalistes véhiculaient des arguments xénophobes, tous les médias leur tomberaient dessus, dénonçant « cet intolérable scandale ».

Si des personnalités ou des journalistes tiennent un discours rurauxphobe, personne ne dit rien. Pire, certains médias ou certaines émissions sont des habitués ou des relais de discours rurauxphobes. Deux poids, deux mesures ? Oui, assurément.

Conseil national de la ruralité

CONSEIL.NATIONAL.RURALITE@gmail.com

 

?« Ethique animale » page 235 : Zoophilie. « C'est en milieu rural que les chiffres sont les plus élevés »